TRIBUNE : La mixité sociale dans les écoles et collèges parisiens, un enjeu central pour les prochaines municipales

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Schémas extraits de la présentation de Julien Grenet à la Réunion pleinière de l’OPMIRE du 6 septembre 2018 à la Mairie du 20e arrondissement,
Composition sociale des secteurs et des collèges parisiens

Le 6 septembre 2018, dans la salle des fêtes de la Mairie du 20ème, nous avons assisté à la première réunion plénière de l’Observatoire parisien de la mixité sociale et de la réussite éducative (OPMIRE). Présidée par la maire de Paris Anne Hidalgo et le recteur de l’Académie de Paris Gilles Pécout,  elle a été notamment l’occasion de renforcer le constat des inégalités sociales massives entre certains collèges parisiens – parfois très proches géographiquement, ainsi que des résultats très encourageants des projets pilotes de regroupement de secteurs de collèges dans des quartiers des 18ème et 19ème arrondissements (« secteurs multi-collèges ») mis en œuvre à la rentrée 2017.
Cette réunion importante a finalement montré l’intérêt d’étendre ce type de dispositif à d’autres arrondissements, en l’ adaptant finement au contexte dans lequel il s’inscrit, et en proposant des offres pédagogiques équivalentes pour chaque collège concerné.

Où en est-on aujourd’hui du déploiement de ce dispositif dans d’autres quartiers de la capitale?

Les concertations annoncées par les responsables de la Ville de Paris et du Rectorat durant cette réunion prennent des formes et des rythmes différents dans les arrondissements où nous savons qu’il est nécessaire d’agir rapidement : 10ème, 12ème, 13ème et 20ème.  Pour le moment, l’implication des élus dans le lancement de ces projets varie, car ils craignent une opposition des parents les plus privilégiés, et les engagements du Rectorat concernant la mise à disposition de moyens adéquats permettant de mettre en place ces projets de manière satisfaisante restent flous.

Or, le temps qui passe ne joue pas en faveur d’un véritable débat démocratique concernant la mise en place de dispositifs permettant d’améliorer la mixité sociale dans les écoles et collèges parisiens. Il faut donc amorcer des changements réels observables dès la prochaine rentrée  

Il est urgent de lancer des concertations et de proposer des solutions concrètes

La perspective de nouveaux secteurs multi-collèges a suscité beaucoup d’espoir chez certains parents et enseignants, que nous avons pu rencontrer ou réunir depuis la réunion de l’OPMIRE, et il est urgent de la concrétiser par des propositions, un calendrier et des engagements précis pour une mise en œuvre dès la rentrée 2019.

Sachant que la délibération concernant la sectorisation devra être votée par le Conseil de Paris au plus tard au début du mois de février, nous demandons à la Maire de Paris, aux Maires des arrondissements concernés et au Rectorat de se saisir de ces projets, de mener des concertations au plus vite et de soumettre des solutions concrètes au vote du Conseil de Paris de manière concomitante.  

Vivre ensemble à Paris : un défi et un enjeu central des prochaines municipales

Restaurer la mixité dans les collèges est un enjeu pour développer la capacité d’individus de situations sociales diverses à vivre et dialoguer ensemble. Quand les enfants ont été ensemble dans leur scolarité, leur regard sur l’altérité est différent. Le vivre ensemble n’a pas de sens si les  secteurs sont composés de sous quartiers très ghettoïsés. L’enjeu est de pallier à un Paris de plus en plus fortement ségrégué, fractionné en fonction des revenus, des statuts socio-professionnels, des relations d’emploi, des quartiers et des identités culturelles, avec les tensions qui en résultent. Le collège, comme l’ensemble du système scolaire, doit éduquer l’ensemble des élèves dans leur diversité. Il s’érige  ainsi en rempart à la fracturation, en participant à l’intégration sociale, en favorisant l’ouverture des élèves, la confiance en soi et en autrui. Il doit apprendre à nos enfants la variété du vivant et le respect dû à chacun, et leur permettre de “faire société”. Le sentiment d’appartenance commune permet de lutter contre les séparatismes sociaux et culturels.

De plus , les comparaisons internationales montrent que les systèmes scolaires les plus efficaces, ceux dont les élèves ont des compétences et des connaissances élevées, sont aussi ceux qui ont la plus faible dispersion des résultats entre les meilleurs et les moins bons, entre les plus favorisés socialement et ceux qui le sont moins : Finlande, Corée, Japon, Nouvelle-Zélande…. Autrement dit : la mixité scolaire est un facteur d’amélioration des apprentissages et des résultats scolaires de tous les élèves.

Enfin, le rôle du secteur privé, dont on sait qu’il contribue à fragiliser la mixité dans les quartiers concernés, devra être abordé avec la volonté de le faire contribuer à ce projet de société. Il y a  actuellement à une dissonance cognitive des politiques, avec une contradiction entre des discours appelant à plus de justice sociale et scolaire, à une égalité réelle des chances et des actions trop limitées, ou des mesures cosmétiques. Les quelques projets  en cours sont le fait de la mobilisation de parents soucieux de préserver la mixité à Paris, suivis par de rares maires d’arrondissement et des équipes pédagogiques engagées. Nous assistons à une déresponsabilisation politique qui fait peser beaucoup sur les parents et le niveau local.
Pourtant preuve est faite dans les 18ème et 19ème arrondissements que la mixité sociale au collègue peut se faire, et fonctionne.

Cette question de la mixité sociale et donc de la lutte contre les inégalités, notamment de réussite, est un élément majeur d’amélioration du système éducatif français  – dont toutes les études rappellent inlassablement à quel point il est marqué par le poids des déterminismes sociaux – et particulièrement à Paris qui présente de ce point de vue une situation caricaturale. Elle est devenue un sujet désormais incontournable (dont même les représentants de l’enseignement privé se sentent obligés de parler…) et nous avons la conviction qu’elle sera un élément fondamental du débat démocratique des prochaines élections municipales.

Au delà de l’école, elle est au cœur de la Ville dans laquelle nous voulons vivre : un Paris bienveillant, riche de ses diversités, du métissage et du partage.

Pourtant le risque est grand d’aboutir à un Paris fortement ségrégué, fractionné en fonction des revenus, des statuts, des relations d’emploi, des quartiers et des identités culturelles, avec les tensions qui peuvent en résulter.

Face à cela, la responsabilité des élus est majeure et la capacité d’action des collectivités locales importante.

C’est pourquoi nous – parents, enseignants, militants – demandons un engagement politique sans faille des élus parisiens et une action publique concrète et assidue qui poursuive et amplifie à l’échelle parisienne et dès la rentrée prochaine les premières actions menées dans les 18ème et 19ème arrondissements.

Le Collectif Apprendre Ensemble & Le Collectif Collèges Paris Est

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